Méthode traditionnelle de pavage
Le terrain à paver sera creusé à la profondeur des fondations pour constituer le lit de la chaussée. Les pierres, les terres de mauvaise qualité, et généralement toutes les matières nuisibles à la bonne exécution des ouvrages, devront être enlevées du chantier. Le lit de la chaussée sera ensuite dressé de manière à présenter partout une forme régulière et parallèle au bombement de la chaussée à établir. C’est ce qu’on appelle dresser le fond de coffre. Dans certains cas il peut être avantageux de mélanger de la chaux à un sol trop argileux. Il faut veiller à humidifier le sol trop sec. Le fond du coffre ainsi préparé sera alors cylindré à refus. Ce fond du coffre, soigneusement damé, doit donc présenter une surface parallèle à celle du pavage à construire : son bombement est celui du pavage terminé. Le profil bombé est soigneusement établi, à raison de 2 cm par mètre [1], pour conduire l’eau de ruissellement vers l’égout.
La fondation aura une épaisseur de 0,25 m. Les matériaux à employer seront la pierraille 40/63 et le poussier 0/2, devant servir comme matière d’agrégation, à quantités égales. Le porphyre sera seul admis. La pierraille sera d’abord épandue sur une épaisseur de 0,15 m. et le tout sera recouvert d’une couche de poussier, que l’on arrosera copieusement afin de le faire pénétrer entre les éléments déposés et obturer les vides. Pendant la mise en œuvre du matériau d’agrégation, le cylindrage sera poursuivi jusqu’à ce que la masse soit cylindrée à fond. Le poussier sera considéré comme entièrement incorporé lorsque l’eau servant à l’arrosage s’écoulera à la surface de l’empierrement au lieu d’y pénétrer.
On procédera de la même façon pour la pose de la 2ème couche de 0,10 m. La fondation terminée devra présenter une surface bien lisse et réaliser le profil prévu. Le rouleau compresseur à employer pour ces diverses opérations devra peser au minimum 10 tonnes. C’est ce qu’on appelle le procédé du macadam à l’eau.
Puis, c’est du sable qu’on répand, couche par couche, toujours très soigneusement damées, en inondant bien, sur une épaisseur de 20 cm. Trois m3 de sable pris sur le tas libre doivent donner 2 m3 compactés sur la forme (par exemple, l’épaisseur de 12 cm d’une couche se réduisant ainsi à 8 cm compactés). Il est important de bien surveiller la qualité du sable : il doit être siliceux, exempt de matière argileuse ou terreuse, il doit être sec, grenu, rude au toucher et crissant à la main, à laquelle il ne doit pas s’attacher. Les plus gros grains ne doivent pas avoir plus de 4 mm de diamètre, et les plus petits pas moins d’un mm, faute de quoi, ils se réduiraient en boue.
La forme étant bien compactée, on y répand enfin une couche de sable d’environ 5 cm. C’est cette dernière couche de sable qui servira de lit de pose aux pavés. Tout ceci n’intervient bien sûr qu’après qu’on ait placé de chaque côté de la chaussée une solide bordure de pierre bleue, assise dans un béton maigre. Une rangée sur deux de pavés se commence en posant une boutisse [2] contre la bordure du trottoir. Puis on continue la rangée avec des pavés normaux. Les pavés sont placés sur la couche de sable par rangées perpendiculaires et droites par rapport à la chaussée ; dans une rangée, il faut veiller à n’utiliser que des pavés ayant tous la même largeur, c’est pourquoi ils sont triés. Ils seront choisis et assemblés de manière à former des joints serrés et réguliers et seront liaisonnés à la moitié ou au tiers de leur longueur par rapport à la rangée précédente (croiser les joints). La pose se fait à l’aide du marteau, présentant d’un côté la forme d’une houe allongée, et de l’autre une tête. La houe sert à préparer la place du pavé, la tête à l’assurer quand il est placé. A la pose il faut bien en déterminer le nivellement, les affermir au marteau et les garnir de sable sec dans les joints. On doit apporter la plus grande attention à tenir les pavés trois centimètres plus haut que la ligne du tracé (pour qu’après le dresseur puisse les ramener par battage à la hauteur exacte). Puis on coule du sable mouillé dans les joints et on le fiche jusqu’au refus. Le pavage sera ensuite arrosé et battu au refus au moyen d’une hie en fer de 14 kilos au minimum. Le dresseur frappe ainsi la tête de chaque pavé de façon à comprimer au maximum le sable des joints et celui placé sous la queue des pavés. Le damage se fera en travaillant simultanément et symétriquement sur la même ligne de pavés, et en partant des coulants d’eau pour aboutir à l’axe de la chaussée.
En règle générale, il y aura un paveur à la ligne par deux mètres de largeur de rue. Chaque brigade sera composée de paveurs, d’un dameur, et d’un nombre de manœuvres égal à celui des paveurs. Tout pavé qui se brisera, se fendra ou s’enfoncera au-dessous du niveau prescrit, sera immédiatement enlevé et remplacé. Il en sera de même de tout pavé que le battage ne pourrait ramener dans la courbe régulière de la chaussée. Le cylindrage final du pavage se fera longitudinalement des hanches vers le centre par passages successifs; chaque passage chevauchera sur le précédent d’une demi-largeur de roue et le dépassera de 50 centimètres environ. Le cylindrage final [3] des pavages effectués n’exclut pas le damage préalable à la main. On évitera de faire des dépôts de terre ou de pavés sur la partie fraîchement pavée; seuls les pavés nettoyés et destinés à être mis en œuvre pourront y être déposés;
Lorsque la réception provisoire du pavage aura été faite, le pavage sera recouvert d’une couche de sable de 0,01 m. d’épaisseur minimum. Cette couche sera fortement arrosée. Au besoin, il sera épandu une seconde couche, qui devra être arrosée à son tour. L’excédent de sable devra être enlevé par l’entrepreneur après les travaux.
Il faut se garder d’employer du ciment lors de la pose des pavés, ainsi ils sont indéfiniment recyclables. C’est l’immense avantage de ce pavé de porphyre, extrèmement dur, quasiment inusable. Il convient de redresser les pavés (= remise à bout) tous les vingt ans. L’entretien est primordial: il faut intervenir rapidement dès qu’un pavé se déchausse.
Sources:
Cahier des charges spécial des entreprises de travaux de pavage de la voirie, Ville de Bruxelles, Service Technique des Travaux Publics, Pavage, 1964.
BOUSQUET, M., Traité pratique du maçon, du terrassier, du paveur et du conducteur de travaux publics, Librairie Garnier, Paris, 1908.
[1] On peut forcer un peu la pente à un mètre du caniveau, à raison de 3 cm par mètre.
[2] La boutisse est un pavé plus long de 50% (1,5 x la normale).
[3] Actuellement, on préférera utiliser une plaque vibrante plutôt qu’un rouleau compresseur.